Le Mardi à Monoprix de la Compagnie Ah le Zèbre !

 


Après Qui va là, son adaptation du texte d'Emmanuel Darley, Thierry de Pina poursuit son travail de déconstruction du regard, celui que l'on pose, injuste, sur les êtres en marge avec une indifférence feinte ou un mépris affiché.
Après nous avoir emportés dans les eaux troubles de la défaillance et du désœuvrement, incarnant Alexandre, un de ces laissés-pour-compte que l'on croise sans vraiment vouloir les voir le long de nos trottoirs, Thierry de Pina endosse le costume de Marie-Pierre, un costume tout droit sorti des ateliers de Jean-Paul Gautier et qui figure l'ambivalence de son personnage.
 
Tous les mardis Marie-Pierre rend visite à son père, ils déjeunent ensemble puis elle lui fera son ménage et sa lessive, le linge séché l'attendra sur l’étendoir le mardi suivant. Le rituel immuable s'achève par la sortie au Monoprix, où telle quelle, Marie-Pierre arpente les rues de la ville de son enfance, cette ville où elle a été, il y a longtemps maintenant, Jean-Pierre.
Les regards se tournent, les chuchotements enflent, son père baisse les yeux.
 
S'appropriant la langue si particulière d'Emmanuel Darley, Thierry de Pina use de cette précision du langage qui nous dit l'essentiel. Des mots simples qui en disent long sur la souffrance induite par ces regards biaisés.
L'interprétation évite tous les écueils de la caricature. D'une intelligence sensible, Thierry de Pina nous plonge dans l'intimité d'une femme confrontée aux différentes strates du jugement, celui de son père, de ses lointaines connaissances, de la société.

A travers la simple description d'un quotidien, le Mardi à Monoprix a cette élégance subtile qui, loin de tout discours vindicatif, explicite les blessures d'une femme confrontée aux jugements rapides, aux impressions faussées. Offrant la parole à ceux que l'on n'écoute pas, le comédien renverse l’indécence et dénonce la violence des préjugés.

Thierry de Pina délivre un hommage sensible au droit à la différence, et, avec une générosité émouvante, humanise la souffrance de ceux et de celles qui derrière les regards en biais et les lignes de faits divers, ont tant à dire.
Une invitation à regarder plus loin, au-delà des apparences.

 


 Le Mardi à Monoprix d'Emmanuel Darley mise en scène par la Compagnie Ah le Zèbre !  du 7 au 29 juillet à 10 heures Au BA Théâtre dans le cadre du Festival d'Avignon

 en Alternance avec  Qui va là ?

(75) Paris 10-12 novembre 2023 I Bouffon Théâtre *
(78) Conflans-Ste-Honorine 17-19 novembre 2023 I Story Boat
(77) Coulommiers 8 décembre 2023 I Micro-Folie
(34) Castelnau-le-Lez 14-23 décembre 2023 I TRAC Théâtre
(76) Tourville-la-Rivière 18 janvier 2024 I Médiathèque
(63) Clermont-Ferrand 28 février 2024 I Librairie les Volcans
(44) Nantes 7-16 mars 2024 I Théâtre de Poche Graslin
(06) Nice  29 mars 2024  Théâtre de la Cité
(84) Avignon  29 juin - 21 juillet 2024 I  B.A.Théâtre
(89) Fontaines 5-6 octobre 2024 I Théâtre de l'Atelier Bleu

Avec : Thierry De Pina
Costume Jean-Paul Gaultier
Musique : David Mus et Emma Catlin
Production : Compagnie Ah le Zèbre !
Crédit Photo : © Marine Cessat-Begler

Sophie Trommelen, vu à la Nouvelle Scène le samedi 19 juin 2023