Quand des mineurs s’initient à l’art, les visages noircis par le charbon deviennent les porteurs d’une lumière nouvelle. Inspirée de faits réels, la pièce de Lee Hall, Les Peintres au Charbon, adaptée par Adrien Popineau, retrace l’aventure singulière d’un groupe d’ouvriers anglais qui, dans les années 1930, découvre la peinture et, avec elle, une autre façon de voir le monde. Une histoire d’émancipation, d’art et de solidarité, portée avec une belle vitalité par la compagnie Les Messagers.
Scénariste du film Billy Elliot, Lee Hall porte en lui cette appétence pour les récits d’émancipation sociale. Au jeune garçon issu de la classe ouvrière du nord de l’Angleterre qui s’émancipe des stéréotypes liés à sa classe sociale et à son genre en intégrant le Royal Ballet de Londres, l’adaptation d’Adrien Popineau des Peintres au charbon résonne avec force.
Nous sommes en 1934, animés par le désir de comprendre ce qui leur échappe, quelques ouvriers du syndicat des mineurs s’inscrivent à la section locale du Workers' Educational Association pour suivre des cours du soir. Se présente alors Robert Lyon, professeur au King’s Colleges, qui saisit rapidement la nécessité de dépasser le simple cours magistral pour provoquer l’interaction. Elle propose à ses élèves d’entrer dans l’art par la pratique, car oui, dans la pièce d’Adrien Popineau, Robert Lyon est une femme interprétée avec une belle justesse par Valentine Galey. Peindre, avec leurs mots, leurs gestes, leur vécu.
Les gueules noires envahissent le plateau. L’adresse est directe, les répliques fusent. Dynamique et judicieuse, l’introduction de la pièce installe avec finesse le contexte social et humain de ces hommes aux gestes rudes mais à l’appétit sincère pour la pensée, la création, l’étonnement.
Figurant l’art comme un outil de réappropriation, Adrien Popineau signe un spectacle à la fois accessible et profondément inspirant. La force du propos s’incarne dans une troupe de comédiens remarquables. Adrien Popineau, Valentine Galey, Mati Galey, Nikola Krminac, Louise Dupuis, Fabien Floris, et Benoit Dallongeville, habités par leurs rôles, justes et vibrants, donnent chair aux luttes, aux doutes, à la rencontre du geste artistique et de vies qui se racontent. Si l’art n’a rien à dire, c’est de la décoration.
Avec conviction, la compagnie Les Messagers nous rappelle que la culture n’est jamais une affaire de classe, mais bien d’accès. Qu’elle peut jaillir là où on ne l’attend pas. Chaque regard porté sur le monde mérite d’être entendu, regardé, mis en lumière. Une pièce comme un manifeste doux mais tenace pour une émancipation artistique accessible, une conquête légitime et joyeusement collective d’une expression socialement plurielle.
Les Peintres au charbon de Lee Hall mise en scène d'Adrien Popineau du 05 au 24 juillet à 13H05 au 11. Avignon dans le cadre du Festival OFF d'Avignon
https://www.11avignon.com/fr/les-peintres-au-charbon