Showgirl de Jonathan Drillet et Marlène Saldana

 

 

Marlène Saldana et Jonathan Drillet présentent sur la scène du Théâtre de la Bastille une adaptation aussi personnelle que saisissante du film de Paul Verhoeven, Showgirls

Dépouillant les scènes du film, Marlène Saldana et Jonathan Drillet déstructurent le scénario de Paul Verhoeven, et déroulent un narratif saisissant, un layout vivant d'un genre nouveau.
Maillant à la fois le parcours de l'héroïne du film, Nomi Malone, et de l'actrice Elizabeth Berkley, sacrifiée sur l’autel de la critique à la sortie du film en 1995, fiction et réalité s'entrecroisent dans la performance flamboyante de Marlène Saldana. 
La représentation aux sonorités électro-pop entêtantes de Rebeka Warrior épuise la violence du regard abjecte et libidineux d'une masculinité toxique. La scénographie de Sophie Perez figure ce Las Vegas de paillette dans ce qu'il a de plus kitsch et de plus décalé dans son décorum.
 

Dans son Showgirl au singulier, Marlène Saldana, reine Queer vertigineuse, use d'un burlesque trash et explosif pour bousculer les valeurs d'une culture archaïque et dépassée. L'ironie permanente, portée par un premier degré assuré, remet à sa juste place l'exploitation du corps féminin. La vulgarité assumée du Show de Marlène Saldana renverse alors la tendance, glorifiant dans une posture de woman's revange ces danseuses de revues érotiques. La comédienne conscientise le commerce pathétique dont elles font l'objet.

Tout en affutant au millimètre prés les artifices dont elle pare son corps, Marlène Saldana s'adresse en aparté à Jonathan Drillet. La discussion décortique sur un ton subtilement désinvolte les mécanismes de la domination masculine. Les références aussi éloquentes que tragiques fusent et toujours remettent en place les contextes d'emprises de l'industrie cinématographique qui utilise l'image de la femme pour assouvir une perception pernicieuse des rapports hommes-femmes.

Consumant, du haut de ce cratère qui brûle de mille feux, un monde qui a encore du mal à se regarder d'un œil critique, épuisante, à la limite de l'étourdissant, Marlène Saldana fait acte de résistance avec une énergie percutante. 

 



 photos : © Thomas Hennequin

 Showgirl de Jonathan Drillet et Marlène Saldana jusqu'au 9 mars au Théâtre de la Bastille

Conception, texte et interprétation : Jonathan Drillet et Marlène Saldana 
Librement inspiré de Showgirls, de Paul Verhoeven (1995)
Création musicale Rebeka Warrior Mix Krikor
Conseil chorégraphique : Mai Ishiwata
Scénographie : Sophie Perez
Sculpture : Daniel Mestanza
Création costumes, maquillage et perruques : Jean-Biche
Lumières : Fabrice Ollivier
Son : Guillaume Olmeta
Assistant : Robin Causse
Régie générale : François Aubry dit Moustache
 
Production déléguée : The United Patriotic Squadrons of Blessed Diana
Coproduction : Nanterre Amandiers - Centre dramatique national, Centre Chorégraphique National de Caen en Normandie, Comédie de Caen - Centre dramatique national de Normandie, Charleroi Danse, Théâtre Saint-Gervais Genève, Les SUBS (Lyon), La rose des vents - Scène nationale Lille métropole Villeneuve d'Ascq, TAP - Scène nationale de Poitiers et La Comédie de Reims
Production : Chloé Perol
Diffusion et administration : Fabrik Cassiopée, Manon Crochemore & Mathilde Lalanne
Remerciements : Pierre Hardy, Philippe Quesne, Neonglazenails, Cédrick Debeuf Studio, Marc Chevillon, Jérôme Pique, Makoto Chill Okubo, César Vayssié, Pierre Desprats, Narcisse Agency, Warriorecords, Elise Lahouassa et Paul Verhoeven. 
 
Sophie Trommelen, vu le 28 février 2024 au Théâtre de la Bastille