Les Chaises d’Eugène Ionesco mise en scène de Thierry Harcourt

 

 

Thierry Harcourt s'attache au répertoire d'Eugène Ionesco et met en scène la pièce emblématique, si caractéristique de son théâtre de l'absurde, Les Chaises.

Fâchés avec leurs amis, leur famille, leurs collègues, un vieux et une vieille se retrouvent face à leur solitude. Une solitude que la tendresse vache qu'ils se portent et leur connivence évidente permettent de supporter. Au pied du mur, face à leur âge avancé, le vieux convoque une assemblée pour délivrer son ultime message.

Ionesco aimait à dire que la vraie réalité est dans l'imaginaire, dans l'interprétation. C'est dans cette idée que s'ancre Les Chaises. Thierry Harcourt s'empare de la farce tragique et, entre le délire onirique et l'angoisse existentielle qui envahit les protagonistes, déploie toute leur humanité.

Frédérique Tirmont et Bernard Crombey incarnent toute l'angoisse qui anime leurs personnages qui naviguent entre la nostalgie de leurs souvenirs déformés et l’exaltation de ce dernier rendez-vous qu'ils donnent au monde. Emplissant la scène de leur présence, faisant parler les corps emportés par ce dernier sursaut, les comédiens font surgir toute la poésie de la farce.
Frédérique Tirmont et Bernard Crombey teintent les caractères de ces personnages émouvants d'un émerveillement faussement naïf et véritablement touchant.
 

Si la fumée, qui par intermittence envahit la scène, évoque la fantasmagorie de ce monde post-apocalyptique, l'adaptation de Thierry Harcourt se concentre dans la sobriété de la mise en scène et l’intensité du jeu des comédiens. Dans cet espace-temps indéterminé, évoluant entre et la vie et la mort, les personnages choisissent la lueur d'un dernier appel comme pour mieux fermer la page d'une vie bercée de petits bonheurs, d'illusions, de douleur et d'amour.

Le rythme de la mise en scène alors s'emballe, la frénésie galvanise le vieux et la vieille portés par ce dernier instant qu'ils décident grandiose. Frédérique Tirmont et Bernard Crombey figurent toute l'exaltation qui emporte le vieux et la vieille à l'arrivée des convives qui un à un s'installent sur ces chaises inexorablement vides pour écouter un message implacablement inaudible. Aucune signification cohérente ne surgira des paroles de l'orateur. Si le message ultime est incompréhensible, c'est qu'il n'y a peut-être rien à comprendre.
Thierry Harcourt met en scène le théâtre de l'absurde, le théâtre de la vie. Limpide, l'adaptation éclaire le propos de Ionesco persuadé qu'aucun sens intelligible ne peut être donné à l'existence.
 
Avec un sens de la théâtralité certain, Thierry Harcourt, Frédérique Tirmont et Bernard Crombey font surgir toute la mélancolie et la tendresse de ce couple vieillissant qui évolue aux abords des abîmes de sa fin de vie.

 
 


Les Chaises d’Eugène Ionesco jusqu'au 10 mars 2024 au Lucernaire.

Mise en  scène :Thierry Harcourt assisté de Clara Huet
Avec ; Frédérique Tirmont et Bernard Crombey
Musique : Tasio Caputo
Lumière : Thierry Harcourt et Pascal Araque
Costumes : Laurent Mercier
Production : Compagnie Macartan
Coproduction : Théâtre Montansier, Comédie de Picardie, Richard Caillat – Arts Live Entertainment – Fimalac Culture
Soutien : Adami
 
Sophie Trommelen, vu le 6 février 2024, au Lucernaire.